Retours sur le séminaire Savoirs Partagés et la séance dédiée à la justice cognitive et à la science ouverte juste

Le 6 juin 2024, j’ai eu le plaisir de représenter l’équipe de Calenda durant une séance du séminaire SAvoirs PArtagés dédiée à la question de la justice cognitive et aux manières dont celle-ci s’incarne dans les pratiques de recherche et les activités éditoriales, en particulier telles qu’elles se font dans les institutions de la science ouverte et des sciences humaines et sociales.

J’y étais bien entourée, puisqu’en compagnie de Gilbert Babéna, secrétaire général du Grenier des savoirs, enseignant-chercheur à l’université de Maroua (Cameroun)¹, Gethème Irié, enseignant-chercheur à l’université de San-Pedro (Côte d’Ivoire) et Wiliamson Ornéus, étudiant à l’Institut d’études et de recherches africaines de l’université d’État d’Haïti (UEH) et lauréat du prix Florence Piron.

La séance était animée et préparée par Celya Gruson Daniel, Simon Dumas Primbault et Simon Apartis. Elle a été, pour l’équipe de Calenda, l’occasion de mettre à la discussion une série de questions qui traversent notre activité sur le calendrier depuis plusieurs années et que nous formulions en 2021 de la manière suivante :

Calenda, en tant que plateforme numérique, facilite-t-elle la circulation des savoirs, et en quels termes ? Quel rôle cette plateforme joue-t-elle dans les asymétries Nords / Suds qui se déploient dans les univers de la recherche ? Quelles évolutions techniques et éditoriales pourrait-on imaginer pour que le calendrier contribue mieux à réduire ces asymétries ?

Céline Guilleux (15 avril 2021). Calenda, vingt ans d’événements en sciences humaines et sociales. L’argumentaire de la journée d’étude. Le carnet de Calenda. Consulté le 15 octobre 2024 à l’adresse https://doi.org/10.58079/m6nq

Ce séminaire a été l’occasion de considérer ces questions sous une nouvelle perspective : celle de la « justice cognitive », concept élaboré par l’anthopologue indien Shiv Visvanathan², et développé dans les travaux de Florence Piron³ et dans ceux du collectif Science ouverte en Haïti et Afrique (SOHA).

Comment se manifestent les enjeux de justice cognitive dans nos pratiques quotidiennes de modération des annonces d’événement que nous recevons sur le calendrier, dans les critères d’examen que nous mobilisons, dans nos modalités d’échanges avec nos contributeurs et contributrices ? Poser cette question est un moyen pour nous de prendre au sérieux l’idée que l’action de publier (et même s’il ne s’agit « que » d’annonces d’événements) est une activité prise dans des relations de pouvoir et de domination structurant le « système-monde » scientifique⁴. Que pouvons-nous alors faire, à notre échelle, pour ne pas être un maillon des injustices sous couvert de concourir aux politiques de science ouverte⁵ ?

Les réponses partielles – parfois à un état embryonnaire – que nous apportons en tant qu’équipe (il s’agit d’une réflexion collective même si mes collègues n’étaient pas présents lors de la discussion) sont disponibles dans le compte-rendu étendu de cette séance de séminaire, rédigé par Celya Gruson Daniel et Clémence Lascombes et mis en ligne sur le blog d’InnoCube.

À noter que, depuis juin 2024, ce sujet a continué de faire son chemin et qu’une note de travail interne a été rédigée par Elsa Zotian, rédactrice en chef de Calenda. Il n’est pas impossible que plusieurs des analyses qui y sont développées soient également partagées sur ce blog dans le courant de l’année 2025.

1. Et depuis septembre 2024 également membre du conseil scientifique de Calenda [↩]
2. Shiv Visvanathan, 2016, « La quête de justice cognitive » (Traduction de « The Search for Cognitive Justice », 2009), Florence Piron, Samuel Regulus, Marie-Sophie Dibounje [↩]
3. Voir, par exemple, Florence Piron, « Justice et injustice cognitives : de l’épistémologie à la matérialité des savoirs humains », dans Émilie Tremblay et Ricardo Dorcé (dir.), Les Classiques des sciences sociales. 25 ans de partage des savoirs dans la francophonie, Québec, Science et bien commun, 2018, p. 259-273. https://scienceetbiencommun.pressbooks.pub/classiques25ans [↩]
4. Florence Piron, Antonin Benoît Diouf, Marie Sophie Dibounje Madiba, Thomas Hervé Mboa Nkoudou, Zoé Aubierge Ouangré, Djossè Roméo Tessy, Hamissou Rhissa Achaffert, Anderson Pierre et Zakari Lire, « Le libre accès vu d’Afrique francophone subsaharienne », Revue française des sciences de l’information et de la communication [En ligne], 11 | 2017, mis en ligne le 01 juillet 2017, consulté le 31 octobre 2024. URL : http://journals.openedition.org/rfsic/3292 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rfsic.3292 [↩]
5. Politiques mises en œuvre dans un régime néolibéral des sciences avec lequel les principes de science ouverte ne sont pas nécessairement contradictoires. Voir par exemple les positions critiques de Philip Mirowski ou d’Isabelle Laboulay : Philip Mirowski, « The future(s) of open science », Social Studies of Science, 48(2), 2018, p. 171-203, https://doi.org/10.1177/0306312718772086 (traduction en français : Mirowski-Future-s-open-science-TradFR) ; Isabelle Laboulay, « Dénaturaliser la science ouverte. La genèse d’un savoir d’institution », Zilsel, 12(1), 2023, p. 11-28 : https://doi.org/10.3917/zil.012.0011 [↩]

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